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Modernité et socialisme
26 juin 2008

Les Irlandais ont dit non !

Les Irlandais ont dit non au traité de Lisbonne voulu par Nicolas Sarkozy et Angela Merkel. Ils l’ont dit massivement et en priorité dans les classes populaires. Cette fois, personne ne peut dire que c’est un vote contre Jacques Chirac qui a été émis, c’est un non à une Europe qui fait peur, qui n’apparaît pas comme ce qu’elle devrait être. Elle devrait être vécue comme un rempart contre la mondialisation, comme une arme pour que l’Europe soit un acteur global et elle est une nouvelle fois perçue comme une menace pour l’identité nationale, comme un outil à détricoter la cohésion sociale nationale.

Le vote irlandais, c’est aussi la démonstration que le principe fondateur de l’Union, celui de la solidarité, n’est pas vécu comme une règle de base par les peuples d’Europe.

Tous, nous devrions être d’accord pour considérer que comme en France et aux Pays-Bas, ce vote démontre le décrochage qu’il y a entre le cours européen tel qu’il se déroule à Bruxelles et auquel participent les gouvernements soutenus par leur Parlement d’une part, et la perception démocratique et sociale telle qu’elle est vécue par les citoyens -et d’abord les plus modestes- d’autre part. Le meilleur moyen d’y répondre, c’est très certainement de clore cette séquence institutionnelle dans laquelle l’Union est maintenant plongée depuis l’échec du traité de Nice en 2000 sous présidence française de Jacques Chirac. Il faut maintenant faire avancer une Europe des projets qui permette d’armer l’Europe face au défi de la mondialisation et de répondre à la triple crise financière, énergétique et écologique ainsi qu’aux aspirations d’une Europe plus sociale, à une Europe qui ne soit pas qu’un marché.


D’une certaine manière cependant, nous ne sommes pas tout fait dans la même situation. Non pas parce que l’Irlande a moins d’habitants que la France, l’Union est une Union des Etats et des peuples qui ne peut être réformée qu’à l’unanimité, mais parce que ce non intervient sur un texte qui a déjà été renégocié et modifié. Dès lors, il faut que les Irlandais disent ce qu’ils veulent, et que sur cette base un aménagement puisse être trouvé. C’est la deuxième fois que l’Irlande dit non à un traité européen mais jusqu’ici, elle n’a pas utilisé les possibilités de dérogation, que d’autres, comme le Danemark ou le Royaume-Uni et la Suède ont utilisé légalement ou de fait. Si on en croit les thèmes les plus entendus dans la campagne, les craintes irlandaises porteraient sur l’avortement, la fiscalité ou la politique étrangère. La fiscalité étant à l’unanimité, on voit mal ce que les Irlandais pourraient exiger de plus, sinon annoncer leur intention de systématiquement faire usage de leur faculté de veto comme le membre de la Commission originaire de leur pays le fait déjà. Sur le droit à l’avortement, s’ils considèrent que la Charte des Droits fondamentaux est une menace, qu’ils fassent comme leurs voisins Britanniques. Sur le service d’action extérieur commun qui doit renforcer la capacité de politique étrangère de l’Union et dont ils semblent craindre qu’il ne menace leur statut de neutralité qui avait été réaffirmé à la suite du non Irlandais au traité de Nice en 2001, rien n’interdit d’imaginer une clause dérogatoire spécifique à l’Irlande.

Mais alors, et c’est également valable pour nos amis britanniques, j’imagine qu’il y a un certain nombre de fonctions (président de la Commission, de l’Union, du Parlement européen pour ne citer que les principales) qu’ils ne pourraient pas prétendre exercer.

Jacques Chirac n’a pas voulu s’occuper des suites du non Français, Nicolas Sarkozy n’a pas voulu consulter les Français. Il devra traiter les suites du non Irlandais.

Il est urgent de faire sauter ce bouchon institutionnel pour nous concentrer sur l’essentiel. Ce non ne doit pas ré-ouvrir des débats dépassés au sein du Parti socialiste français. Ce n’est pas autour des questions institutionnelles que l’Europe retrouvera la confiance des peuples inquiets de la globalisation et des dérèglements qu’elle provoque. Cela signifie aussi que l’on ne peut pas prendre des décisions à Bruxelles ou Strasbourg dans le dos des Européens et contraires à leurs aspirations. Pour cela aussi, dans le prochaine campagne pour les élections européennes, les Socialistes devront dire qui est leur candidat comme Président de la Commission et sur quel projet. Ce serait une contribution utile à la démocratie européenne qui reste à inventer.

Pervenche Berès

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